Jusqu’à ce que Le Nôtre, en 1667, prolonge l’allée centrale du jardin du palais des Tuileries et y plante, de chaque côté, une double rangée d’ormes, là, où, de nos jours, se situe ce que d’aucuns n’hésitent pas à appeler « la plus belle avenue du monde », il n’y avait qu’une vaste zone broussailleuse et maraîchère. On appela cette nouvelle voie « le Grand Cours », (pour la distinguer du Cours-la-Reine voisin), et aussi, à partir de 1709, « les Champs-Elysées », par allusion au séjour des bienheureux dans la mythologie gréco-romaine. En 1724, l’avenue fut prolongée jusqu’à la butte de Chaillot ( place de l’Etoile/Charles de Gaulle actuelle ) et, en 1774, jusqu’au pont de Neuilly. Deux ans plus tard, pour réduire la pente, on abaissa de 8 mètres la butte de Chaillot. (Les déblais résultant de cette opération expliquent la petite montée inattendue de la rue Balzac).
Encore à la fin du XVIIIe siècle, les Champs-Elysées n’étaient qu’un lieu sauvage, désert et peu sûr. Cependant, au lendemain de la Révolution, un établissement élégant, quoique tenant encore beaucoup de l’auberge de campagne, le restaurant Ledoyen, qui existe toujours, commença à devenir en vogue. Et pourtant, en 1800, les Champs-Elysées ne comptaient que 6 maisons ! L’invasion de la France, consécutive aux défaites subies par l’empereur Napoléon Ier, amena , en 1814, les soldats alliés, russes et prussiens, à camper sur les Champs-Elysées, bientôt suivis par les Anglais en 1815-16. Deux ans furent nécessaires pour réparer les dégâts causés à cette occasion. On entreprit alors de grands travaux au cours desquels les allées furent exhaussées et sablées, et les arbres remplacés.
Ce ne fut, toutefois, qu’à partir de 1828, date à laquelle l’Etat céda l’avenue à la Ville, que les Champs-Elysées commencèrent à connaître de réels embellissements : trottoirs, contre-allées asphaltées, fontaines, éclairage au gaz, et installation d’établissements publics : cafés, restaurants, salles de théâtre ou de concert… Le 15 décembre 1840, par un froid glacial, 100000 personnes, massées au long de l’avenue, assistèrent au retour des cendres de Napoléon. Depuis cette année-là, l’avenue avait commencé à se border d’hôtels et de maisons et de nouveaux quartiers à se développer, mais ce fut avec le IInd Empire que les Champs-Elysées allaient connaître une époque de faste, avec la construction d’importants immeubles, lorsque la riche société lui accorda ses faveurs et que grands personnages et financiers y élurent domicile. Cafés concerts, restaurants, panoramas, cirques, etc. attirèrent une foule élégante dont le nombre augmentait encore les jours où l’on courait à l’hippodrome de Longchamp ou à l’occasion des expositions universelles (1844, 1845, 1867, 1900 ). L’avenue devint alors la demeure du monde distingué et prit cet éclat que, bien qu’elle ait perdu de son caractère aristocratique, elle n’a cessé de connaître depuis.
Car, aujourd’hui, les Champs-Elysées attirent toujours les foules. Des touristes, bien sûr, venus du monde entier, mais aussi les Parisiens qui, par dizaines ou par centaines de milliers, se rassemblent, spontanément, à l’occasion de grands moments d’émotion nationale : Libération de Paris le 26 août 1944, manifestation du 30 mai 1968, marche silencieuse en hommage au général de Gaulle le 12 novembre 1970, victoire de la France au championnat du monde de football en 1998, ou encore de spectaculaires opérations : Train Capitale (juin 2003), par exemple.
Longs de 1910m, les Champs-Elysées se divisent en trois parties :
1) Un jardin, parc-promenade ( 700m de long sur 300 à 400m de large ), partant de la place de la Concorde et dont l’entrée est encadrée par les célèbres chevaux de Marly, comportant contre-allées avec pelouses et massifs de verdure entre lesquels se trouvent différents établissements tels que, à gauche en montant, le restaurant Ledoyen, (transféré à l’emplacement actuel en 1848),le Petit et le Grand Palais, le théâtre du Rond Point, ancien Palais de Glace (1860), ainsi que les statues de Clemenceau et du général de Gaulle, et à droite, l’Espace Pierre Cardin ( ancien Théâtre des Ambassadeurs ), le théâtre Marigny, et, un peu en retrait, les jardins et le palais de l’Elysée, résidence parisienne des présidents de la République.
2) Le Rond Point, avec ses bassins, dessiné par Le Nôtre, qui juxtapose ses hôtels IInd Empire (à droite, seule la façade est d’origine) et ses magasins modernes et, à deux pas, le célèbre Guignol créé en 1818.
3) L’avenue bâtie, large de 71m, bordée d’arbres, avec ses contre-allées piétonnières et ses nombreuses galeries adjacentes, centre d’affaires, de commerce, de tourisme et de divertissements. De part et d’autre, ainsi que dans les galeries, se succèdent halls d’exposition des grandes marques d’automobiles, banques, compagnies aériennes, « maisons » des pays étrangers ou des provinces françaises, cafés, bars, restaurants, cinémas, cabarets, magasins de vêtements de luxe et autres commerces… qui, jusqu’à fort tard dans la nuit, attirent quotidiennement une foule cosmopolite.